vendredi 12 décembre 2008

Les décès survenant dans le mois suivant une chimiothérapie : résultats d'une enquête nationale au Royaume-Uni.

Le NCEPOD (National Confidential Enquiry into Patient Outcome and Death), organisation britannique indépendante du NHS (*) et des associations professionnelles médicales, a mené une revue nationale consacrée aux patients décédés au cours du mois suivant l'administration d'une chimiothérapie anticancéreuse. Un groupe d'experts a été chargé de revoir les dossiers médicaux ainsi que les éléments essentiels de l'organisation hospitalière des patients traités entre le 1er juin et le 31 juillet et décédés entre le 1er juin et le 31 août de la même année. Plus de 1000 établissements ont été sollicités, seuls 64% d'entre eux ont répondu et 366 ont été retenus. Pendant la période d'analyse, 47 050 traitements ont été documentés ainsi que les 1415 décès survenus au cours du mois suivant dont 1044 se sont avérés exploitables.
De façon globale les résultats de l'enquête sont les suivants :
  • 35% des patients ont reçu des soins jugés satisfaisants, conformes aux standards définis par les experts.
  • Pour 38% des patients, la qualité des soins a été considérée comme perfectible ainsi que leur organisation dans 6% des cas.
  • 8% des patients ont reçu des soins de qualité jugée insuffisante et 8% supplémentaires avaient des dosseirs médicaux considérés comme insuffisamment documentés.
  • Environ 15% des patients ont été admis au cours de leurs derniers 30 jours de vie dans un autre établissement que celui où avait été prescrite et administrée la dernière chimiothérapie.

L'intention thérapeutique était palliative dans 86% des cas, environ un quart des patients présentant lors de l'administration de la chimiothérapie un état général coté 3 ou 4 OMS c'est à dire particulièrement altéré. De plus, 43% des patients ont présenté une toxicité majeure au cours des 30 jours précédents leur décès malgré une réduction des doses dans plus d'un quart des cas
Dans 20% des cas, l'indication de chimiothérapie a été considérée comme inappropriée par le panel d'experts et discutée préalablement de façon pluridisciplinaire uniquement dans 60% des cas. Enfin, les experts ont considéré que dans 27% des cas, la chimiothérapie avait une responsabilité directe dans le décès du patient ou dans le raccourcissement de sa survie.
Les résultats de cette enquête peuvent apparaître sévères pour les cancérologues et les hématologistes britanniques que d'ailleurs bon nombre de commentateurs se sont empressés de critiquer. De fait, la prescription d'un traitement cancérologique spécifique (**) susceptible de dégrader l'état général des patients lors d'une situation palliative avancée, ce qui semble être le cas de la très grande majorité des patients concernés par cette étude, doit rester une décision exceptionnelle, mûrement réfléchie et discutée à plusieurs. Toutefois, rien de permet de penser que cette enquête britannique révèle des pratiques moins pertinentes que dans d'autres pays dont le nôtre... pour la bonne et simple raison qu'aucune étude comparable n'a été effectuée à l'échelle nationale en France. Saluons donc le courage et la franchise de nos confrères britanniques et essayons de les imiter, au moins dans leur souci de transparence.

(*) NHS : National Health Service, organisation étatique gérant le système de santé au Royaume-Uni.

(**) Traitement cancérologique spécifique : par convention recouvre les traitements qui ne sont en général prescrits qu'en présence d'une tumeur maligne. Il s'agit en fait de la radiothérapie et de la chimiothérapie.

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