Philippe Even a toujours eu l'habitude de s'exprimer sans détours. Ancien président de l'Université Paris V, il livre une analyse sans complaisance de la performance des CHU français vue à travers leurs activités de recherche. Il en ressort que les CHU parisiens, et notamment Paris V, assurent une activité de recherche évaluée par le nombre et la qualité des publications internationales largement supérieure à celle d'autres CHU parisiens et surtout de celles des CHU de province. Les raisons de cette disparité majeure, semble-t-il unique dans les pays occidentaux, tiennent d'après P. Even à la dispersion des CHU empêchant l'émergence en tout lieu d'une masse critique suffisante de compétences et de moyens techniques, à la médiocrité de la formation scientifique des étudiants en médecine, aux modalités surannées de nomination des médecins hospitalo-universitaires (professeurs et maîtres de conférences) ainsi qu'à leur "état d'esprit" pour certains, et enfin à la dépendance totale de la médecine française vis à vis des innovations qui viennent toutes de l'étranger, qu'elles soient techniques ou médicamenteuses.
P. Even aurait pu ajouter à cette liste déjà copieuse de facteurs délétères et en l'occurrence peu discutables, le poids de l'industrie pharmaceutique sur la recherche clinique hospitalière, les effets pervers du secteur privé à l'hôpital public ou l'impact croissant du volume d'activité sur le niveau des ressources hospitalières sans prise en compte suffisante de sa qualité.
Plus généralement, la recherche biologique fondamentale s'effectue pour l'essentiel hors de l'enceinte hospitalière ce qui est normal; par contre la recherche biomédicale et bien sûr la recherche clinique doivent être des axes majeurs de développement des hôpitaux publics notamment quand ils sont universitaires. Malheureusement force est de constater que ces deux derniers volets de la recherche ne sont pas pour autant à une hauteur correcte dans les CHU; par exemple, l'enquête nationale publiée en 2005 par la direction du service médical de la CNAM portant sur la pratique de la chimiothérapie anticancéreuse en 2002, montre un taux d'inclusion des patients dans les essais cliniques très inférieur au niveau de 10% souhaité par le Plan Cancer. Ainsi seuls 3,9% des patientes présentant un cancer du sein et 3,4% des patients porteurs d'un cancer-colorectal sont inclus dans un essai clinique ; il est difficile de se réconforter en constatant que ces mêmes taux sont respectivement de 0,7 et 0,7% dans le secteur privé lucratif.
La performance nationale globale est cependant supérieure dans la mesure où il faut y ajouter les travaux de recherche réalisés dans les grands instituts extra-universitaires de biologie, les centres anticancéreux, les écoles normales supérieures, etc.. qui assurent plus de 50% de la production nationale de publications dans le domaine des sciences du vivant. Il n'en reste pas moins qu'il est aujourd'hui évident que le mythe de la triple mission de soins, d'enseignement et de recherche, conférée à chaque praticien hospitalo-universitaire a vécu et ce depuis plusieurs années. Il est urgent de revoir ce concept fondateur de la réforme Debré de 1958 sans rien renier de ses effets extrêmement bénéfiques pour l'essor de la médecine française pendant au moins les 20 premières années de son application. Plusieurs pistes d'amélioration sont possibles et doivent être rapidement explorées : découplage des missions, accréditation personnelle pour chacune d'entre elles, possibilité de changer de type d'activité en cours de carrière, mobilité géographique des postes aujourd'hui inexistante, appel d'offres nationaux et internationaux, entre autres. Il faut aller vite si l'on veut enrayer un délitement encore mineur mais qui peut apparaître de plus en plus important au fur et à mesure que d'autres pays progressent dans le champ de la recherche médicale qui constituera dans l'avenir un enjeu social et économique évident au-delà de son impact strictement sanitaire.
P. Even aurait pu ajouter à cette liste déjà copieuse de facteurs délétères et en l'occurrence peu discutables, le poids de l'industrie pharmaceutique sur la recherche clinique hospitalière, les effets pervers du secteur privé à l'hôpital public ou l'impact croissant du volume d'activité sur le niveau des ressources hospitalières sans prise en compte suffisante de sa qualité.
Plus généralement, la recherche biologique fondamentale s'effectue pour l'essentiel hors de l'enceinte hospitalière ce qui est normal; par contre la recherche biomédicale et bien sûr la recherche clinique doivent être des axes majeurs de développement des hôpitaux publics notamment quand ils sont universitaires. Malheureusement force est de constater que ces deux derniers volets de la recherche ne sont pas pour autant à une hauteur correcte dans les CHU; par exemple, l'enquête nationale publiée en 2005 par la direction du service médical de la CNAM portant sur la pratique de la chimiothérapie anticancéreuse en 2002, montre un taux d'inclusion des patients dans les essais cliniques très inférieur au niveau de 10% souhaité par le Plan Cancer. Ainsi seuls 3,9% des patientes présentant un cancer du sein et 3,4% des patients porteurs d'un cancer-colorectal sont inclus dans un essai clinique ; il est difficile de se réconforter en constatant que ces mêmes taux sont respectivement de 0,7 et 0,7% dans le secteur privé lucratif.
La performance nationale globale est cependant supérieure dans la mesure où il faut y ajouter les travaux de recherche réalisés dans les grands instituts extra-universitaires de biologie, les centres anticancéreux, les écoles normales supérieures, etc.. qui assurent plus de 50% de la production nationale de publications dans le domaine des sciences du vivant. Il n'en reste pas moins qu'il est aujourd'hui évident que le mythe de la triple mission de soins, d'enseignement et de recherche, conférée à chaque praticien hospitalo-universitaire a vécu et ce depuis plusieurs années. Il est urgent de revoir ce concept fondateur de la réforme Debré de 1958 sans rien renier de ses effets extrêmement bénéfiques pour l'essor de la médecine française pendant au moins les 20 premières années de son application. Plusieurs pistes d'amélioration sont possibles et doivent être rapidement explorées : découplage des missions, accréditation personnelle pour chacune d'entre elles, possibilité de changer de type d'activité en cours de carrière, mobilité géographique des postes aujourd'hui inexistante, appel d'offres nationaux et internationaux, entre autres. Il faut aller vite si l'on veut enrayer un délitement encore mineur mais qui peut apparaître de plus en plus important au fur et à mesure que d'autres pays progressent dans le champ de la recherche médicale qui constituera dans l'avenir un enjeu social et économique évident au-delà de son impact strictement sanitaire.
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