La grande majorité des traitements cancérologiques médicamenteux sont aujourd'hui réalisés chez des patients qui ne sont pas hospitalisés de façon continue. Ce type de prise en charge, qui alterne venues en service de jour ou en hospitalisation courte et séjours à domicile entre les cycles de chimiothérapie, est réputé aussi sûr que si la totalité du traitement était réalisé en hospitalisation continue. En outre, le souhait des patients en faveur d'hospitalisations aussi courtes que possible a conduit progressivement à délivrer des traitements de plus en plus complexes, et souvent de plus en plus toxiques, sur cette base dite "ambulatoire" et en tout cas alternative à l'hospitalisation continue classique.
Quatre services d'oncologie nord-américains, 3 d'adultes et 1 d'enfants, ont mis en commun leurs dossiers pour mesurer le taux d'erreurs médicamenteuses engendré par ce type de prise en charge. Les résultats publiés dans le Journal of Clinical Oncology on-line, montrent qu'il existe un nombre substantiel d'erreurs allant de 7% pour les patients adultes à près de 19% pour les enfants. Au total, sur les 112 erreurs relevées, 64 ont été considérées comme potentiellement dangereuses et 15 ont effectivement été suivies d'effets indésirables graves. Les erreurs constatées sont nettement plus fréquentes lors de l'administration des médicaments à domicile (de 0 à 14,5%) que quand ils sont délivrés au décours d'une hospitalisation, le plus souvent d'une journée (de 0,3 à 5,8%).
La cause la plus fréquente de ces erreurs semble résider dans les différences existant entre le protocole de traitement initial, défini lors du diagnostic, et la prescription faite à chaque cycle de traitement qui dépend alors de l'état clinique du patient et de ses résultats biologiques immédiats. La coexistence de ces deux documents, valant tous deux prescription, explique l'essentiel des erreurs d'administration et fait recommander aux auteurs de cette étude une amélioration de la relation entre tous les acteurs de soins ainsi qu'une éducation spécifique du patient.
S'il n'est pas question de revenir sur la tendance lourde en faveur de l'externalisation de traitements de plus en plus complexes et potentiellement toxiques, qui auraient justifié sans hésitation une hospitalisation continue classique il y a 10 ou 20 ans, force est de constater que cette prise en charge discontinue comporte des risques. En effet, l'essentiel des effets toxiques des médicaments utilisés en chimiothérapie se révèlent plusieurs jours après leur administration alors que le patient est à son domicile, son retour en hospitalisation, le plus souvent dite "de jour" correspondant à la phase de récupération. Si l'on y ajoute les erreurs lors de l'administration des médicaments qui doivent être pris à domicile, comme cela est mis en évidence dans cette étude, il apparaît clairement que la chimiothérapie dite "ambulatoire" constitue une situation problématique qui mérite de s'assurer que tous les acteurs concernés y compris le patient lui-même sont au fait des risques potentiels encourus, même si le confort du patient s'en trouve amélioré et le coût pour la collectivité allégé.
Medication Errors Among Adults and Children With Cancer in the Outpatient Setting. Kathleen E. Walsh,* Katherine S. Dodd, Kala Seetharaman, Douglas W. Roblin, Lisa J. Herrinton, Ann Von Worley, G. Naheed Usmani, David Baer, and Jerry H. Gurwitz. Journal of Clinical Oncology online, December 29, 2008.
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