jeudi 4 septembre 2008

Inégalités sociales et cancers : deux lectures possibles.

Le numéro 33 de septembre 2008 du Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire (BEH) publié sous l'égide de l'Institut de Veille Sanitaire (InVS) fait paraître une étude réalisée par l'unité INSERM U687 de Villejuif consacrée aux inégalités sociales de mortalité par cancer en France.
Les résultats publiés confirment ce que la pratique clinique quotidienne pressentait depuis longtemps à savoir que le niveau social influence l'incidence et la mortalité de certains cancers et notamment de ceux survenant dans la sphère ORL, le poumon et l'oesophage. Ces cancers, très majoritairement masculins, sont fortement liés à une consommation excessive de tabac et d'alcool dont on sait qu'elle prédomine dans les classes sociales les moins favorisées. L'élément nouveau contenu dans cet article est la démonstration d'une aggravation de ces inégalités d'incidence et de mortalité au fil du temps, en l'occurrence entre 1968 et 1996, confirmant de façon indirecte l'accentuation de la précarité sociale dans notre pays au cours des dernières décennies.
Au delà de cette lecture première qui soulève de multiples interrogations sur l'avenir de notre "modèle social", il en existe une seconde plus encourageante. En effet, pour ce qui est des cancers qui sont peu influencés par les habitudes de vie et notamment les addictions toxiques, les différences de niveau social ne semblent pas influencer l'incidence ou la mortalité de façon aussi marquée que pour ceux étroitement liés à l'alcoolotabagisme. Ceci pourrait signifier qu'il n'existe pas réellement d'impact du niveau social sur la performance de la prise en charge thérapeutique contrairement à une idée reçue fréquemment rencontrée dans le public, à savoir que la qualité des traitements dépendrait de la position sociale et de la fortune des patients.
Ainsi, à défaut de mettre en oeuvre des stratégies efficaces de prévention, notamment vis à vis des risques patents comme l'alcool et le tabac, notre système de santé reste toutefois capable d'offrir une prise en charge globalement égalitaire, ce qui est tout à son honneur. Une comparaison avec les études publiées dans d'autres pays, notamment nord-américains, devrait nous inciter à tout faire pour que cette égalité devant la médecine soit préservée à défaut d'assurer une égalité devant les risques.

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