lundi 24 novembre 2008

Ascenseur pour la mondialisation des risques sanitaires

Le 7 octobre dernier, des camions venant des USA sont bloqués par les douanes mexicaines en raison d'une radio-activité anormale qui provient en fait de boutons d'ascenseurs Otis, en forme de pièce de monnaie, précédemment livrés par la société iséroise française Mafelec. Ces matériels avaient déjà été détectés par les douanes US le 3 octobre précédent mais finalement autorisés à entrer. Le colis avait déclenché une alerte en passant sous le portique de détection lors de son départ de Roissy le 17 septembre, mais cet incident n'avait pas été signalé aux autorités pour des raisons inconnues à ce jour. La société Mafelec qui fabrique, entre autres, des boutons d'ascenseurs essentiellement pour le compte d'Otis, reçoit les pièces métalliques qui les constituent de deux sociétés indiennes, Bunts et Laxmi Electronics, qui elles-mêmes s'approvisionnent chez SKM Steels qui se fournit lui dans une fonderie également indienne, Vipras Casting. De fait, plusieurs milliers d'entreprises indiennes, dont 4 500 fonderies, se sont spécialisées dans le recyclage des déchets notamment métalliques. Elles sont totalement dépourvues de matériel de détection, ce qui laisse la porte ouverte à des déchets toxiques, explosifs ou, dans le cas d'espèce, radioactifs. Il s'agit en l'occurrence de cobalt 60 provenant vraisemblablement de matériels de radiothérapie ou d'un irradiateur industriel réformé.
Les pièces contaminées sont arrivés en France à partir du mois d'août dernier sans déclencher une quelconque alerte Elles ont donc été manipulées par les salariés de la société Mafelec sans précaution particulière et ce n'est que lors de leur réexpédition que leur radioactivité anormale a été détectée.
Même si les quantités de radioactivité présentes dans les boutons-poussoirs sont faibles, l'enquête de l'ASN (*) a montré que plus d'une vingtaine de salariés de Mafelec avaient reçu une dose d'exposition de 1 à 3 millisievert (**) et donc supérieure à la limite réglementaire fixée pour le public à 1 par an, ce qui en fait un incident de niveau 2 sur une échelle qui en compte 7. L’ASN a transmis au procureur de la République un procès-verbal à l’encontre de la société Mafelec faisant état de plusieurs infractions notamment au code de la santé publique. Par ailleurs, une enquête internationale a montré que des incidents identiques avaient été décelés en Suède.
Comme lors d'autres affaires de la même veine (héparine chinoise frelatée, produits alimentaires divers contaminés, etc), on retrouve chaque fois la recherche par des acteurs industriels occidentaux du coût de fabrication le plus bas possible, ce que seuls des pays comme la Chine ou l'Inde, entre autres, sont capables d'offrir. Jusqu'où peut-on déléguer dans des pays situés à des milliers de kilomètres la réalisation d'éléments essentiels de notre vie quotidienne sans avoir toujours les moyens de s'assurer de leur innocuité ?
L'Inde envisage de faire passer sa production d'acier de 56 millions de tonnes en 2008 à 280 millions en 2020, une partie importante provenant du recyclage de matériels divers provenant pour l'essentiel des pays occidentaux. Bien qu'elle ait récemment édicté des lois visant à interdire l'importation de matériels dangereux notamment radioactifs, elle n'a pas, de l'aveu même des autorités indiennes, les moyens d'en assurer le contrôle effectif lors de leur entrée sur son territoire. Il y a donc fort à parier que d'autres incidents du même type se reproduiront dans l'avenir ce qui incite à faire en sorte que nos systèmes de contrôle soient efficaces, ce qui ne semble pas être toujours le cas...

1 commentaire:

  1. Cette histoire est ahurissante. J'en avais entendu parler mais merci pour ces détails. Cela me rappelle ce très bon documentaire intitulé "Le cauchemar de Darwin" ou les méfaits de la mondialisation.

    Bravo pour l'article.

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