jeudi 13 novembre 2008

Le respect des recommandations internationales reste insuffisant lors du traitement des cancers coliques

On sait depuis longtemps que la qualité de l'évaluation préthérapeutique influence fortement les résultats du traitement des cancers. Cette évaluation, appelée souvent de façon impropre "bilan", a pour but essentiel de définir avec le plus de précision possible la catégorie pronostique dans laquelle se situe le patient et de lui proposer en conséquence le traitement le plus adapté à sa situation. Le raffinement constant de cette évaluation est soutenu par les données issues de la recherche clinique et par les améliorations régulières de la performance des explorations diagnostiques.
Ainsi, dans le traitement des cancers colo-rectaux, il est admis depuis plus de 10 ans que, lors de la chirurgie, qui est habituellement le premier temps thérapeutique, le segment colique ou rectal enlevé doit être accompagné de l'exérèse d'au moins 12 ganglions situés dans la zone de drainage de la tumeur, leur envahissement éventuel étant un paramètre pronostique majeur. De fait, un nombre total insuffisant de ganglions analysables dans la pièce opératoire rend aléatoire le classement dans une catégorie pronostique, notamment quand aucun envahissement ganglionnaire n'est retrouvé.
Le JNCI (*) a publié récemment un article qui rapporte l'analyse des données issues de la base nationale cancer US portant sur près de 75000 patients opérés en 1996-1997 et 82000 autres entre 2004 et 2005. L'objectif de l'étude est d'évaluer le taux de respect de la recommandation nationale qui était qu'au moins 75% des pièces opératoires permettent l'analyse d'au moins 12 ganglions.
Pour la période 96-97, seuls 15% des hôpitaux américains respectaient les recommandations précédentes, taux qui n'est passé qu'à 38% en 2004-2005. Par ailleurs, si dans l'intervalle 900 hôpitaux ont amélioré leur performance, 310 autres ont vu leur taux de respect de ces recommandations diminuer.
Cette étude montre par ailleurs qu'il existe des différences sensibles entre les différents types d'hôpitaux puisque le taux de respect des recommandations en 2004-2005 est de près de 80% dans les Comprehensive Cancer Centers (**) labellisés par le NCI (***), de 53% dans les hôpitaux de l'administration des Veterans (anciens combattants) et seulement de 34% dans les hôpitaux locaux qualifiés selon la terminologie américaine de "communautaires" au sens territorial du mot.
Ces résultats inspirent deux types de réflexion: d'une part il existe une marge de progression importante dans la qualité des soins, ce qui n'est pas vraiment original, et d'autre part la spécialisation des établissements est un gage d'amélioration de la performance, ce qui est rassurant. Toutefois, il est totalement inenvisageable de concentrer tous les patients porteurs d'un cancer colique dans les institutions spécialisées ; il est par contre indispensable de diffuser les bonnes pratiques dans tous les lieux de soins en veillant cependant à ce qu'un volume minimum d'actes y soit réalisé. C'est l'objectif poursuivi par l'Institut National du Cancer français qui a récemment fixé des seuils minimaux d'activité pour qu'un établissement soit autorisé à traiter les cancers.
(*) JNCI : Journal of the National Cancer Institute
Lymph Node Evaluation as a Colon Cancer Quality Measure: A National Hospital Report Card. Karl Y. Bilimoria, David J. Bentrem, Andrew K. Stewart, Mark S. Talamonti, David P. Winchester, Thomas R. Russell, and Clifford Y. KoJ Natl Cancer Inst 2008, 100: 1310-1317.
(**) Comprehensive cancer centers : établissements US spécialisés en cancérologie répondant à des critères stricts et notamment à l'impératif de pluridisciplinarité. Labellisés par le NCI (***), ils sont à l'heure actuelle au nombre de 43. Leur structure et leur modes opérationnels sont comparables aux 20 centre anti-cancéreux français.
(***) NCI : National Cancer Institute

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