En ces temps de disette démographique médicale annoncée, le syndicat des gynécologues médicaux relance une polémique sur les menaces qui pèsent à leurs yeux sur les effectifs de leur discipline. Pour étayer leur démarche, ils (où plutôt elles, dans la mesure où il s'agit pour l'essentiel de femmes) ont commandé à BVA un sondage dont il ressort globalement que les femmes françaises plébiscitent leur gynécologue et s'inquiètent donc de leur raréfaction prochaine.
Ce débat est emblématique des difficultés qu'il y a, en France peut-être plus qu'ailleurs, à s'affranchir de corporatismes divers. Quel est le problème ? La France est un des rares pays au monde et le seul en Europe à avoir distingué dans ses filières de formation médicale la gynécologie-obstétrique de la gynécologie dite médicale c'est à dire ne réalisant pas d'actes chirurgicaux ou obstétricaux. Enseignée sous la forme d'un Certificat d'Etudes Spéciales depuis les années 60, elle a disparu des filières lors de la réforme de l'internat en 1986. Sous la pression des gynécologues médicales, installées pour la quasi totalité d'entre elles en secteur libéral, la spécialité a réintégré en 2003 la liste des différentes spécialités d'internat avec un Diplôme d'Etudes Spécialisées (DES) à part entière d'une durée de 4 ans, à côté du DES de gynécologie obstétrique. Bien évidemment les internes en gynécologie médicale reçoivent un enseignement d'obstétrique, ceux inscrits en gynécologie obstétrique bénéficiant d'une formation en gynécologie médicale.
La Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale alerte donc l'opinion sur la diminution prévisible de ses effectifs et regrette qu'un nombre trop réduit de postes d'internes soient ouverts dans leur discipline.
Sans vouloir minimiser les services rendus à la population féminine (contraception, dépistage, ménopause, fertilité), on peut toutefois s'interroger sur le caractère prioritaire de cette spécialité dans la gestion d'effectifs médicaux globaux en forte réduction dans les 20 ans à venir; c'est ainsi que d'autres spécialités "plus lourdes" comme la chirurgie viscérale, l'obstétrique voire l'orthopédie, pour ne parler que de la chirurgie, risquent d'être confrontées à des difficultés démographiques aiguës aggravées par une répartition territoriale inadaptée. Faut-il dans ce contexte augmenter le nombre de postes en gynécologie médicale au détriment mécanique d'autres spécialités qui, de par leurs fortes contraintes, attirent moins une population d'internes, fémininisée à plus de 60% ? On peut remarquer en outre qu'une grande partie des services rendus par les gynécologues médicales peuvent être réalisés par des praticiens généralistes ...qui sont de plus en plus souvent des femmes, et que, par ailleurs, les campagnes de dépistage notamment des cancers du sein réduisent la nécessité d'une consultation spécialisée systématique.
Au total, soyons raisonnables et essayons ensemble de ne pas rendre encore plus complexe la difficile adaptation de notre système de soins à la contrainte d'une double raréfaction, celle des professionnels de santé et celles des ressources collectives.
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