Il est habituel de considérer que lors d'une consultation au cours de laquelle une mauvaise nouvelle est annoncée, les informations données ne sont que partiellemment perçues et mémorisées par le patient concerné. Cette constatation est à la base des techniques relationnelles mises en oeuvre dans ce qu'il est convenu d'appeler le processus d'annonce formalisé dans le cadre du plan cancer français en cours de mise en oeuvre et récemment élargi à l'ensemble des pathologies graves dans une publication de l'HAS .
Dans le numéro de novembre du Journal of Clinical Oncology des équipes hollandaises et australiennes ont tenté de mesurer ce phénomène et d'en étudier les éventuels facteurs de variabilité, en interrogeant les patients par téléphone quelque temps après la consultation et en comparant les réponses obtenues avec le contenu enregistré de la consultation. Il apparaît ainsi que moins de la moitié des informations données lors de la consultation sont effectivement mémorisées par le patient et que paradoxalement, plus la gravité de ce qui est annoncé est importante moins le niveau de mémorisation est élevé. Par ailleurs, si l'âge n'est pas globalement un facteur discriminant, les patients de plus de 65 ans ont une mémorisation qui se dégrade quand la consultation a été longue et le nombre d'informations important.Cette étude montre par ailleurs que plus les patients posent de questions moins ils se rappellent du contenu des informations qui leur ont été données, comme s'ils n'avaient écouté que très partiellement les réponses.L'ensemble de ces données est cohérent avec ce que l'on sait de la mise en place des mécanismes de défense face à un événement fortement traumatique et anxiogène, l'intérêt de cette étude étant d'en évaluer quantitativement l'impact.
De façon pratique, on sait bien que s'il n'existe pas de "bonne" façon de donner de mauvaises nouvelles, il est toutefois possible d'en atténuer la traumatisme sans pour autant en dissimuler la réalité. La conversation face à face dans un lieu calme et intime, l'usage de mots simples et clairs, volontiers répétés au cours de la consultation, la présence d'un tiers de confiance, la disponibilité d'éléments explicatifs écrits, le relais informatif complémentaire par un autre soignant, sont des moyens souvent utiles. En outre, la répétition de ces moments d'échanges est probablement l'élément le plus important pour accompagner le patient dans son cheminement plus ou moins difficile et erratique vers la réalité de sa situation dont la perception effective subira de multiples fluctuations au fil des événements qui vont émailler son parcours médical.
Dans tous les cas, la disponibilité et l'écoute des soignants sont indispensables même si elles ne sont pas toujours pleinement effectives le plus souvent par évitement de l'inconfort certain que génèrent ces situations plutôt qu'en raison de contraintes éventuelles d'emploi du temps...
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