mardi 14 octobre 2008

Test biologique prédictif Ovasure (suite)

Dans un précédent message (Polémique autour d'un test de diagnostic précoce en "libre service"), j'avais fait part des réserves émises par la FDA (*) à l'encontre d'un test biologique (OVASURE) censé faciliter le diagnostic précoce des cancers de l'ovaire chez les femmes à risque.
La suite ne s'est pas faite attendre puisque la même FDA a adressé le 29 septembre dernier une lettre de mise en garde à la société Labcorp lui enjoignant instamment de mettre fin à la commercialisation de son test débutée en juin dernier.
Les attendus contenus dans ce courrier révèlent que le refus d'approbation de ce test par la FDA ne repose pas sur sa performance éventuellement discutable mais plutôt sur le fait qu'il n'a pas été mis au point par le laboratoire qui le commercialise. En effet, les tests biologiques diagnostiques ne sont pas contrôlés par la FDA quand c'est le laboratoire lui-même qui a mis au point la technique et qui effectue l'analyse. Dans le cas particulier, ce sont des travaux de recherche effectués au sein de l'université de Yale qui ont permis son élaboration, LabCorp n'ayant semble-t-il qu'un rôle de diffuseur commercial.
Il s'agit là d'un nouvel épisode de la régulation difficile des nombreux tests biologiques prédictifs qui apparaissent au fil du développement de la génomique (**) et de la protéomique (***) . Régulièrement, les industriels souhaitent une mise sur le marché la plus rapide possible compte tenu d'un potentiel de plus-value économique considérable même si la gestion des résultats aussi bien positifs que négatifs soulèvent en fait de multiples problèmes de résolution pratique difficile. En outre, les responsables des laboratoires industriels arguent du fait que si une régulation tatillonne était mise en place, elle ralentirait l'innovation en dégradant le modèle économique. D'ailleurs, le titre LabCorp perdait le même jour 2% au NYSE (****).
Aujourd'hui, plusieurs centaines de laboratoires de par le monde proposent des tests prédictifs pour plus de 1200 pathologies différentes. A titre d'exemple, pratiquement au même moment, une société Islandaise, Decode Genetics, propose un test génomique prédictif du risque de cancer du sein pour le prix de 1625 dollars (!). Ce test est présenté comme prédictif des formes les plus courantes de cancers du sein au-delà des formes familiales liées à la présence d'une mutation des gènes BCRA 1 et 2 qui ne représentent que moins de 5% des cancers du sein.
Quand on interroge le responsable de Decode Genetics sur l'attitude à adopter en cas de test décelant un sur-risque, la réponse est toute trouvée : surveillance rapprochée par IRM mammaire et prise prophylactique de tamoxifène (*****). Pour les autres, surveillance clinique et mammographique habituelle. Pourquoi pas, mais à la condition expresse que les valeurs prédictives, positive et négative, de ce test soient effectives et complètement validées par des études indépendantes, ce qui à ce jour n'est manifestement pas le cas.
Suite au prochain épisode qui ne manquera pas de survenir rapidement.

(*) FDA : Federal Drug Administration
(**) Génomique : étude des gènes , fragments d'acide désoxyribonucléique (ADN) constituant majeur des chromosomes.
(***) Protéomique : étude du protéome c'st à dire de l'ensemble des protéines.
(****) NYSE : New York Stock Exchange, bourse de New York
(*****) Tamoxifène : médicament bloquant les récepteurs aux hormones oestrogènes situés dans les cellules mammaires. Utilisé dans le traitement des cancers du sein.

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