Au moins de mai dernier, un groupe de journalistes américains a pu consulter le bon millier de pages qui constituent le dossier médical du candidat républicain à la Maison Blanche, John Mac Cain. Une grande partie du dossier porte sur les multiples traitements et interventions chirurgicales qu'a subit le sénateur Mac Cain au retour de sa captivité au Viet-Nam.
Mais ce qui intéressait plus les journalistes, c'est le passé médical récent du candidat et notamment l'épisode chirurgical survenu en 2000 au cours duquel deux lésions pigmentées cutanées ont été enlevées, l'une au niveau du bras gauche, l'autre au niveau de la tempe également gauche.
Il s'agissait dans les deux cas de mélanomes malins, celui du bras étant une forme très superficielle dite in situ (*) et donc sans aucune gravité ; par contre, la lésion temporale était manifestement plus évoluée puisqu'il a été pratiqué une lymphoscintigraphie (**) et l'exérèse des ganglions situés en avant du pavillon de l'oreille avec ablation du lobe superficiel de la glande parotide. L'exérèse du mélanome temporal a été complète, les ganglions prélevés tous négatifs. Il n'y a donc pas eu de traitement complémentaire particulier.
La survenue d'un mélanome malin chez un sujet à peau et yeux clairs, ayant reçu une abondante exposition solaire au cours de sa vie, est une situation relativement fréquente et banale mais qui devient très médiatique quand elle concerne l'éventuel chef de la première puissance mondiale. Elle a été bien entendu exploitée par certaines officines électorales et fait l'objet d'un débat désordonné sur les multiples forums abordant les prochaines élections américaines.
Que faut-il en penser ? D'abord que les USA n'ont pas les pudeurs de certains pays de la "vieille Europe" comme la France où l'état de santé de leurs dirigeants reste souvent une zone d'ombre. Ensuite, qu'il est tout à fait probable que 8 ans après le traitement d'un mélanome malin de stade localisé (semble-t-il de stade IIA, fonction de l'épaisseur de la lésion et de son infiltration en profondeur dans la peau), les risques de survenue d'une extension métastatique sont inférieurs à 15%. Par ailleurs, qu'elle est l'espérance de vie moyenne d'un américain de 72 ans en 2008 ? En moyenne, elle est de l'ordre de 11 ans selon les données 2007 du NCHS (National Center for Health Statistics) ce qui laisse le temps pour un mandat présidentiel de 4 ans, voire pour deux, mais aussi pour la survenue d'une évolution du mélanome malin, même si cette éventualité reste peu probable.
Au total, même si la "transparence" sur l'état de santé des dirigeants apparaît comme une bonne chose aux yeux de beaucoup, l'utilisation pratique des données médicales les concernant paraît difficile sauf pour des officines électoralistes sans grands scrupules. En effet, s'il fallait définir pour chaque candidat ou occupant d'une position nationale éminente, les éléments susceptibles d'être considérés comme incompatibles avec la fonction briguée ou occupée, il serait quasi impossible de les déterminer avec pertinence. Par ailleurs, on sait que certains chefs d'état atteints d'une maladie grave et invalidante ont occupé leur mandat sans que l'on puisse démontrer clairement que leur état de santé a altéré la qualité de leurs décisions alors que la lecture de leur dossier médical aurait certainement suscité une vive émotion.
On peut probablement en conclure que ce marronnier de la vie publique est en grande partie artificiellement entretenu, la curiosité du public comportant une part d'identification rassurante, les puissants pouvant être des malades comme les autres...ou presque !
(*) In situ : se dit d'une lésion qui ne concerne que la couche la plus superficielle de la peau ou d'une muqueuse. La lésion reste ainsi à distance des vaisseaux sanguins et lymphatiques et ne comporte donc aucun risque d'essaimage à distance (métastases). Son traitement est local, son pronostic excellent. Synonyme : intra-épithélial.
(*) In situ : se dit d'une lésion qui ne concerne que la couche la plus superficielle de la peau ou d'une muqueuse. La lésion reste ainsi à distance des vaisseaux sanguins et lymphatiques et ne comporte donc aucun risque d'essaimage à distance (métastases). Son traitement est local, son pronostic excellent. Synonyme : intra-épithélial.
(**) Lymphoscintigraphie: technique consistant à injecter au voisinage de la lésion tumorale un corps radioactif qui va être résorbé dans le réseau lymphatique; la radioactivité va alors se concentrer dans le ou les ganglions qui assurent le drainage préférentiel de la tumeur (ganglion dit "sentinelle") ce qui permet de guider une exérèse ganglionnaire sélective moins agressive que la suppression de principe d'un groupe ganglionnaire entier.
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