vendredi 24 octobre 2008

Information du public sur les cancers : peut mieux faire !

La Ligue nationale contre le cancer a récemment commandé un sondage à l'IFOP dans le cadre de la préparation de la convention qu'elle organise à Paris le 23 novembre prochain sur le thème de "la Société face au cancer".
Plus de 80% des répondants se dont dits directement concernés par le thème, mais curieusement seuls 3% ont déclarés avoir été atteint d'un cancer au cours de l'année écoulée, ce qui, compte tenu de la taille de l'échantillon, correspond à environ 140 000 nouveaux cancers alors que l'incidence annuelle réelle est de 320 000; ceci laisse supposer que le sondage n'a pas porté sur toutes les catégories d'âge ou qu'il existe une sous déclaration spontanée, ce qui est tout à fait possible. On peut par ailleurs regretter que les questions portent sur le cancer et non sur les cancers, ce qui conduit à une globalisation des questions et des réponses masquant la grande diversité des pathologies concernées, de leur pronostic et de leur traitement.
Mais l'élément le plus original est que 73% des personnes interrogées disent être assez bien ou très bien informées sur le cancer, pour l'essentiel (80%) par leur médecin. Ce résultat apparaît a priori comme positif notamment pour ses conséquences sur l'adhésion aux démarches de prévention et de diagnostic précoce.
Toutefois, cet optimisme est à tempérer au vu des réponses aux questions suivantes. Ainsi 91% des sondés estiment que les traitements ont beaucoup évolué au cours des dernières années ce qui ne correspond pas à la réalité dans la mesure où, si des avancées indéniables ont été effectuées notamment dans le traitement de maladies rares et/ou en phase de dissémination, le traitement curatif des cancers les plus fréquents repose toujours sur la combinaison harmonieuse de la chirurgie, de la radiothérapie et dans certains cas de la chimiothérapie. A l'inverse, 24% des personnes interrogées estiment qu'il n'y a pas de traitements réellement efficaces contre le cancer, ce qui témoigne, pour une proportion importante de la population, d'une méconnaissance profonde de la réalité actuelle où plus d'un patient sur deux est guéri.
Plus loin, 36%, ce qui est considérable, pensent que le cancer est une maladie héréditaire alors que cela ne concerne en fait que moins de 5% des cancers. Là encore, l'utilisation du mot cancer au singulier a probablement un effet d'amplification de ces réponses erronées. Un tiers des répondants (30%) affirment que le cancer est une maladie chronique; l'ambiguïté de la question posée ne permettant pas de distinguer ceux qui pensent que le cancer est une maladie d'évolution chronique quoique l'on fasse, ce qui est faux, de ceux qui pensent que le cancer est de constitution lente sur plusieurs années voire dizaine d'années, ce qui par contre est vrai. 93% des sondés pensent qu'il est plutôt difficile de travailler quand on est atteint d'un cancer, ce qui n'est évidemment pas vrai dans tous les cas en fonction de l'âge, du type de pathologie et de traitement ainsi que du métier exercé.
A la question "parmi les acteurs suivants, quels sont ceux auxquels vous faites le plus confiance pour s'occuper en priorité du problème du cancer en France ?", les personnes interrogées répondent à 86% les chercheurs, les médecins étant cités par 73% et l'état par 26%. Ces réponses traduisent bien l'espérance forte que place le public dans les avancées de la recherche, ce qui est bien sûr positif, mais également quelque peu ambigu avec le risque de déresponsabilisation collective vis à vis des soins actuels et surtout des démarches de prévention et de diagnostic précoce, la recherche devant trouver "la solution du cancer" présenté là encore comme une maladie unique.
Enfin, garantir l'équité d'accès au traitement est considéré comme indispensable par plus de 70% des personnes interrogées. Cette réponse traduit là encore une connaissance approximative de la réalité, dans la mesure où la France est un des pays au monde où l'accès aux soins est le plus équitable; par contre s'il existe des inégalités, c'est vis à vis des risques de survenue d'un cancer et dans l'accès aux soins innovants compte tenu de la médiocre diffusion de la recherche clinique.
Au total, même si les français semblent penser qu'ils sont bien informés sur les cancers, il reste manifestement du pain sur la planche pour que ce sentiment devienne une réalité plus effective.

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